Cette marche peut réussir avec des enfants, qui, quand ils écrivent je vous aime, ne savent pas qu'ils disent je me rends.
Choderlos de Laclos, Les liaisons dangereuses
19 juin 2017
Cher Alain,
Comment vas-tu? Je t’avais dit que j’allais te déranger.
Philippe est revenu, je l’ai croisé ce matin, et je lui ai parlé d’une idée que j’ai eue, dont je voulais t'entretenir aussi.
Tu as peut-être entendu parler du Séminaire mensuel Figura «Narrations contemporaines: poétique, parcours et pratiques»? Deux chercheurs y dialoguent sur un sujet qu’ils déterminent ensemble. On m'a invitée à faire une intervention sur la création littéraire.
J’ai d’abord demandé à Philippe de m’accompagner. Il a accepté avec l'enthousiasme que tu lui connais, c'est-à-dire avec méfiance. Je lui présentais l’idée ainsi: il faut que ce soit un VRAI dialogue. Nous parlerons ensemble. En fait, nous amorcerons des correspondances dès l'été. Nos correspondances serviront à investir un sujet en particulier (le danger). Devant public, nous lirons nos correspondances. C’est thérapeutique, avons-nous conclu.
Après t’avoir rencontré à Fredericton, mon idée a pris de l’ampleur, je voudrais que tu te joignes à nous. J’en ai parlé à Philippe ce matin, il a accepté avec plus d'enthousiasme cette fois, parce qu'il te connait de longue date, et je crois comprendre que tu es sa zone de confort. Maintenant, il faut voir si tu acceptes.
1) D’abord, nous déjouons la formule; au lieu de deux présentateurs, trois.
2) Je pensais relire Les Liaisons dangereuses (qui problématise la narration mensongère) pour donner un point d’ancrage à la forme de notre travail. Ce qui me fascine dans Les liaisons, c’est le jeu de lettres à plusieurs, avec angles morts. Par cette stratégie, le lecteur peut déceler le mensonge, tandis que les personnages, qui n'accèdent qu'à une partie du discours, restent dupes.
3) Ce qu'on interrogera: la notion de danger. Dans les narrations contemporaines et la création littéraire. Le danger auquel se frotte la littérature, le danger sous toutes les formes qu'il voudra bien prendre.
4) Et si nous incarnions aussi un peu le danger, créant le danger, et nous mettant en danger (dans la position de celui ou celle qui ne sait pas ce qui se trame de l’autre côté (de la correspondance)). Parler à 2, en sachant que nous sommes 3.
5) Nous avons aussi pensé, Philippe et moi, à pousser le danger jusqu’à étudier, en filigrane, l’oeuvre de l’ami.e qui ne prend pas part à la conversation. (EX. Philippe et moi discutons en convoquant Pourquoi Bologne? ou La ligne la plus sombre.) C’est très dangereux…
6) Notre conférence pourrait s’intituler: «Les narrations dangereuses».
Pour résumer: Nous allons prendre un verre tous les trois. Puis, je vous écris à tour de rôle. Vous me répondez et je vous réponds, et vous faites la même chose de votre côté. Pendant des mois, jusqu'en novembre. Qui sait où ça nous mènera.
C’est de la recherche-création. C’est thérapeutique. Je te laisse y penser.
Amitiés,
Cassie
22 juin 2017
Cassie!
J’adore ton idée!!
Et j’ai SUPER le goût de travailler avec toi, avec Philippe!
Ma suggestion: une bière vite pour parler de tout ça. Autre suggestion: on devrait le faire en deux temps: d’abord à Sherbrooke pendant le Forum des étudiants, et ensuite, à Figura. La première fois, on explique le projet, on en donne des échantillons. Au Séminaire Figura, on présente le truc complet…
Les narrations dangereuses 1.
Les narrations dangereuses 2.
Genre.
À vite!!
Alain xx
Bérard, Cassie, Charron, Philippe, Farah, Alain. 2018. Les narrations dangereuses. Cahier virtuel. Numéro 2. En ligne sur le site Quartier F. http://quartierf.org/cahier/les-narrations-dangereuses